Michée, chapitre 4 – La fin des temps.

Michée, chapitre 4 – La fin des temps. leçon en hébreu

La prophétie qui ouvre ce chapitre promet que toutes les nations suivront D', dans une situation de paix mondiale. Elle est presque identique, mot pour mot, à une prophétie d’Isaïe, chapitre 2, contemporain de Michée. Il est nécessaire de comprendre ce que signifie “la fin des temps ”, expression mentionnée à plusieurs reprises dans la Bible, ainsi que la signification générale des prophéties de rédemption future. La plupart des exégètes traditionnels expliquent qu’il s’agit de prophéties concernant un avenir lointain. Mais d' autres notamment de nombreux commentateurs modernes, expliquent qu’en général, les prophéties ont été énoncées dans un contexte historique local et réaliste, destinées à un public pour qui ces messages avaient un sens et une portée concrète. Selon cette approche, même les prophéties de "la fin des temps " ne traitent pas de la fin ultime de l’histoire, mais de la fin de l’époque historique en cours – la fin du processus actuel dans l’histoire.

Dans cette optique, par exemple, il faut comprendre les prophéties sur le Messie et la rédemption comme des prophéties sur un avenir proche, susceptibles d’advenir à l’époque du prophète, si le peuple  en saisit l’opportunité. Plus précisément, interpréter les prophéties concernant le Messie dans les livres d’Isaïe et de Michée comme des prophéties concernant une personne en particulier – le roi Ézéchias. Cette perspective se descelle à l’arrière-plan du propos des Sages : « Le Saint béni soit-Il a voulu faire d’Ézéchias le Messie » (Talmud, Sanhédrin 94a).

Dans un cours donné pendant les Journées d’étude biblique, le Rav Yossi Elitzur compare la figure idéale du Messie telle que dessinée par Michée à celle qu’évoque Isaïe. Le prophète Isaïe (chapitre 11) rêve d’un roi dont la principale force réside dans ses capacités judiciaires (« La justice sera la ceinture de ses reins »), qui juge par intuition (« Il jugera avec la crainte de D', non selon ce que voient ses yeux »), et sous son règne, une paix miraculeuse s’instaure dans le monde (« Le loup habitera avec l’agneau, et la panthère reposera avec le chevreau »).

Michée, dans nos chapitres, met principalement l’accent sur la prospérité économique et le succès militaire, annonçant en fait le retour à un modèle bien connu du passé – celui de David et Salomon. Une de ses ajouts à la prophétie de la fin des jours renvoie à la prospérité économique du règne de Salomon : « Chacun s’assiéra sous sa vigne et sous son figuier, et personne ne les effrayera », comme dans : « Juda et Israël vivaient en sécurité, chacun sous sa vigne et sous son figuier » (I Rois 5,5). Il appelle à un retour de « la première royauté » et mentionne le roi David : « Et toi, Bethléem Ephrata, petite pour être parmi les milliers de Juda, de toi sortira pour moi celui qui dominera en Israël » (Michée 5,1). Il reproche aux enfants de Juda de crier et se lamenter au lieu d’agir, et leur promet une grande victoire militaire.

On peut tenter de proposer des modèles qui combinent ces tensions et dire que chaque prophète a mis l’accent sur des caractéristiques différentes du roi messianique. Le Rav Elitzur soutient qu’il s’agit de deux modèles possibles pour Ézéchias. S’il avait été digne, il aurait été partenaire du salut divin et aurait mené lui-même le combat, mais puisqu’il ne l’a pas été – D' a accompli l’œuvre à sa place. Comme le dit le Midrash : « Il y eut quatre rois. Ce que réclama l’un, l’autre ne le réclama pas. Ce sont : David, Asa, Josaphat et Ézéchias. […] Ézéchias se leva et dit : Moi, je n’ai pas la force de tuer, ni de poursuivre, ni de chanter un cantique, mais je dors sur mon lit, et Toi, Tu agis » (Eikha Rabba, prologue 30).

Ce « débat » est également significatif pour notre génération. Le rêve messianique est-il celui d’un roi miraculeux qui accomplira des prodiges, ou bien celui d’un homme juste qui guidera le peuple sur les chemins de D' et nous sauvera ? (cf. Maïmonide, Lois des Rois 11:3, et les objections de Raavad à ce sujet). Et surtout – le terme « Messie » est-il uniquement un rêve et une prière, ou aussi un appel à l’action ?